Larmes de...

Et il repart... Encore une fois ça va être très long...

Elle regarde la voiture s'éloigner d'elle, tentant une dernière fois de capturer son regard dans le reflet du rétroviseur, voir ses yeux avant de ne pouvoir que s'en rappeller pendant les longues semaines qui vont les séparer. Mais un rayon de soleil vient frapper son visage, l'obligeant à plisser les yeux et lui faisant manquer du coup la chance de capter une dernière fois ce regard qu'elle aime tant.

Le coeur gros, elle continue de regarder la voiture emmener son ange loin d'elle, désormais trop loin pour qu'elle puisse chercher ses yeux... Il sort la main par la fenêtre et lui adresse un dernier au revoir, le geste saccadé, hésitant et surtout triste. Elle sait qu'elle n'est pas la seule à être triste. Et tant mieux, se dit-elle.

La voiture tourne au coin de la rue, enlevant définitivement son aimé à son regard, la laissant là, le coeur gros, les larmes aux yeux...

C'est idiot, elle sait qu'elle va le revoir, encore deux semaines à attendre... Mais deux semaines, quand on aime, c'est comme deux ans. C'est beaucoup beaucoup trop long. Saloperies d'examens qui les séparent. Elle serre les poings pour ne pas fondre en larmes en pleine rue, elle tourne le dos à ce virage qui lui a caché la voiture et rentre dans son immeuble. Marche après marche, en trainant les pieds, elle remonte chez elle, dans ce petit appartement qui il y a encore quelques heures accueillait à bras ouvert une idylle rêveuse...

Elle ouvre sa porte d'entrée et pénêtre dans la pièce principale. Qu'est-ce que cela lui parait vide ! Ce lit aux couvertures encore défaites, ce lit qui porte encore l'empreinte de son sommeil... Sa gorge se noue, les larmes lui piquent encore un petit peu plus les yeux. Elle ne s'approche pas du lit, elle n'a pas envie de sentir son odeur sur l'oreiller...

Elle s'assoit à son bureau, regarde l'écran de l'ordinateur fixement pendant plusieurs minutes et finit par se rendre compte qu'il n'est pas allumé... Elle appuie sur le bouton et le vrombissement du ventilateur chante doucement, brisant la lourd silence qui environnait la pièce, le bruit de son absence...

Les larmes montent trop haut, elles vont déborder dans quelques instants, saturant ses paupières du noir de son mascara, laissant de longues trainées noires sur ses joues, la transformant de jolie jeune fille en petite gothique du dimanche...

L'eau salée mouille ses yeux, encore une demi seconde et ça va être la catastrophe... Le ventilateur continue de chanter, son écran s'allume...

Et les larmes coulent...

Non pas des larmes de tristesse, mais des larmes de joie, des larmes de bonheur, ces larmes qui coulent parce que c'est aussi une façon d'extérioriser sa béatitude...

Sur l'écran, là où deux secondes auparavant elle voyait son reflet en train de craquer, elle peut lire ces lettres qui scintillent comme le plus beau des feux d'artifices :

"Je t'aime..."

Elle rit comme une gamine, elle rit de ses larmes, elle rit de son inquiétude, elle rit parce qu'elle est amoureuse et que les étoiles naissent dans ses yeux quand elle pense à lui...

Elle rit, elle pleure, elle s'étouffe entre ses sanglots et ses rires... parce qu'elle l'aime.

Songe d'une nuit de printemps

Il la regarde. Elle est belle. A demi nue, la couette de leur lit recouvrant son corps jusque sous l'épaule, laissant deviner dans la semi obscurité de l'aube un dos doux, tendre et attirant... Un dos que l'on caresserait jusqu'à la fin des temps, lentement, doucement, tendrement.

Elle est si belle. Endormie telle l'ange de la nuit, son souffle lent et régulier qui fait palpiter le coeur de la nuit, elle inonde son regard. Son souffle s'accorde au sien, inspiration, expiration, leur coeur palpite à l'unisson... comme avant. Il ne voit d'elle que le haut de son dos et sa nuque, comme offerts à son regard.

Sa main se lève, se dirige vers elle, son dos, sa cambrure... Elle bouge dans son sommeil, la couette glisse et laisse apparaître la chute de ses reins. Bizarrement, cela ne l'émeut pas, il continue de regarder cette nuque qui se présente à lui, cette nuque fine, parsemée de mèches de cheveux qui tranchent sur le fond d'albâtre. Sa main se rapproche, elle est à quelques millimètres de sa peau. Il suffirait qu'elle ait la chair de poule pour que leur épiderme entre en contact... Petit à petit, il remonte depuis l'épaule jusque vers le cou, glisse sur la nuque et caresse sans la toucher la colonne vertébrale...

Comment ont-ils pu en arriver là ?

Question idiote... Tout est parti, tout s'est éteint comme la flamme de bougie qui se noie dans la cire. Après quoi, quelqu'un a jeté le pot, la bougie et la mèche contre un mur, brisant l'odoriférant assemblage en morceaux sans forme, en odeurs sans parfum, en tristesse sans larme.

Il ne pleure plus. Ça ne sert à rien de pleurer. Le deuil se fait, la plaie se referme. Il a ressoudé lui même sa blessure avec un gros cadenas puis a jeté la clé dans la rivière des souvenirs.

Trop de larmes.
Trop d'efforts.
Trop peu de réconforts.
Trop de sang dans son âme.

Il ouvre les yeux, quitte ce songe du passé une bonne fois pour toutes. L'ange endormie quitte son regard, s'efface comme la vapeur du passé qu'elle est. Elle restera endormie à jamais, quelque part dans son être, entre rêves, illusions et souvenirs.

Les yeux ouverts, il contemple l'aube qui fait briller les toits parisiens. Il sourit. Cela fait longtemps qu'il n'a pas souri.

Oui. Sourire. Vivre. Ça fait du bien.

Renaître... Et laisser les songes du passé loin derrière soi...


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Ce texte, aussi pompeux que cela puisse paraître, je le dédie à cinq personnes : Tommz, Nelly, Flo, Yann et Pascal. Pour avoir été là quand il le fallait, pour avoir écouter quand il le fallait, pour avoir offert une épaule, une main, une oreille quand il le fallait... Merci d'être mes amis et merci d'être là... Si je souris aujourd'hui, c'est bien grâce à vous...

Le photographe...

Le clic caractéristique. Inaudible pour tous, à peine audible pour lui-même. Ça n'a pris qu'une fraction de seconde, même pas le temps de prendre une inspiration, meme pas le temps de cligner des yeux. L'obturateur a rempli son office, capturer l'éphémérité de l'instant, emprisonner le moment volé au temps... Hérétique défiant Chronos pour vivre sa passion, il passe son temps collé au viseur, snipeur artiste, tueur au déclencheur, prêt à shooter au premier mouvement qui attirera son oeil aiguisé.

Il a tiré. Une cible est entré dans son champ de vision, aérienne vision qu'il n'eut pas le temps d'apprécier. L'image n'avait pas encore atteint son cerveau, tout juste traversé la rétine que son doigt a déjà appuyé sur la gachette... Le coup est parti, a fauché la proie en plein vol et c'est seulement à ce moment là que son cerveau a reçu l'image. En même temps que l'appareil photo la recevait.

Souffle coupé, regard dans le vide, bouche entrebaillée... L'image reste imprimé sur sa rétine. Le temps qu'il reprenne ses esprits, et elle s'est envolée, cette apparition angélique, cette nymphe parisienne qui n'a fait que traverser le monde réel le temps d'une photo. Il regarde la rue de droite à gauche, la cherche du regard, se dévisse le cou à vouloir regarder dans tous les sens en même temps.

Mais rien.
Elle a disparu.

Il ne peut plus rester là, continuer à chercher de quoi faire de bonnes photos. C'est fini, il ne trouvera pas mieux que ce qu'il vient d'apercevoir. Il n'a qu'une seule pensée en tête, développer sa pellicule et savoir si la photo est bonne...

Oh mon Dieu, faites qu'elle soit parfaite...

-

Chambre noire pour lumière rouge, peur bleue pour vision dorée... Il s'enferme dans sa pièce, son laboratoire, son antre. Sa femme ne le dérangera pas, elle sait qu'il ne faut pas le déranger quand il est dans "sa" pièce. A peine rentrée de sa promenade, il a envoyé valser toutes ses affaires et s'est précipité dans la pièce de développement avec son appareil et un étrange regard... Elle ne l'avait jamais vu comme ça. Il ne s'était jamais vu comme ça.

Fébrile. Ses mains tremblent. Son coeur joue une chanson qu'il ne connait pas, à mi-chemin entre le tango et la techno... Etrange... Petit à petit, le papier obscur se révèle dans le bac, les produits chimiques révèlent peu à peu les premiers contours incertains de la photo. C'est comme un peintre dont l'oeuvre se dessinerait trait après trait sous ses yeux à toute vitesse, d'abord les détails extérieurs, flous, puis des points de plus en plus précis. Certains détails commencent à apparaitre, tel un message écrit à l'encre sympathique qui se révèle à la lueur de la bougie...

Allons belle ange, révèle moi tes contours, ton visage, que cette lumière rouge soit la chaleur de la bougie qui illuminera ton regard sur papier glacé.

Des mèches claires. Une joue à croquer. Des oreilles délicatement ourlées. Oh, elle est déjà si belle. La bouche commence à se dessiner, charnue, pulpeuse, fruit mûr que l'on meurt d'envie de cueillir dans l'arbre. Son nez aquilin apparait lentement, appendice fragile, petit, droit... parfait. Puis arrivent ses yeux... Ooooh, ses yeux... La photo noir et blanc ne permet que de supputer qu'ils sont bleus. Si flamboyants, tellement intenses... Quelle inondation de sentiments à travers ce regard. On pourrait tout y lire, la détermination, la gentillesse, la légère timidité, la grâce et la beauté incarnée...

Il regarde cette photo. Longtemps. Des heures. Il est coupé du monde extérieur. Il n'entend même pas sa femme qui tape doucement à la porte pour le prévenir que le diner est prêt. Il ne l'entend pas plus quand elle se met à tambouriner de plus en plus fort, morte d'inquiétude après les longues heures qu'il a passé enfermé dans cette pièce.

Plus rien ne l'atteint. Plus rien ne l'émeut. Plus rien ne le touche.

Sauf elle.

Son ange. Son ange sans nom.

Il faut qu'il la revoie.

-

Le même endroit qu'hier. La même heure qu'hier. Il l'attend.

Il a quitté sa chambre noir il y a une heure à peine, après y avoir été enfermé pendant près de vingt heures. Il est sorti de la pièce et n'a même pas aperçu sa femme, roulée en boule sur le canapé, endormie après avoir passé la nuit à se ronger les sangs... Il n'a qu'un but.

Elle.
Elle, qui ne vient pas. Elle qui n'arrive pas. C'est l'heure pourtant... Elle DOIT repasser par ici... C'est vital ! Il faut qu'il la revoie !
Elle va venir. Il suffit d'attendre assez longtemps. Oui, assez longtemps.
Il s'adosse au mur et il attend.
Il attend. Il attend... Le temps s'écoule... S'écoule... S'écoule...
Il ne fige plus le temps, son appareil reste enfermé dans sa sacoche.
Et le temps continue de s'égréner... Longtemps... Très longtemps... Si longtemps qu'il ne sait plus depuis combien de temps il est là, debout dans la nuit parisienne... A attendre sans que rien ne vienne.

Il ne fallait pas défier Chronos. Le maître du temps peut être très susceptible...

Et bien...

Voilà... Premier post de ce... blog... Bon, on va dire blog, mais ça me fait mal à mon petit coeur d'anti-blogs :) On va plutôt dire Bibliothèque personnelle ? Comment ça trop ronflant ? Hmmm...

Bon, on s'en fout... Ici, vous ne trouverez que mes textes, qui valent ce qu'ils valent (des cacahuètes, des clopinettes, des allumettes, je vais arrêter là avec les mots en "ettes"...). Nouvelles, poêmes, conneries écrites en cours d'histoire littéraire... Comptez pas sur moi pour raconter ma vie ici, ou alors au travers de mes textes, et là ce sera à vous de démêler le vrai du faux.

Au passage, un merci à miss Nelly de m'avoir aidé à choisir les noms du blog... Argh, non pas blog... Truc... C'est bien truc...

*Prends sa paire de ciseaux et coupe le ruban tricolore à l'entrée*

Bon, place à l'écriture maintenant !